Chasse : le gibier d’eau s’apprête à en prendre pour 9 ans

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Christophe Béchu, Ministre de la transition écologique, s’apprête à signer un arrêté autorisant la chasse sur les terrains de l’État durant 9 ans. Naturellement, il est éclairé par une commission ad hoc. Coulisses de la réunion déterminant l’avenir des oiseaux d’eau …

Photo : Jean-Louis Schmitt (Cliquer pour agrandir)

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Convenons-en, le « CNCFS » n’est pas familier au premier venu. Un éclairage s’impose, il s’agit du Conseil National de la Chasse et de la Faune Sauvage. Plus précisément, un organisme consultatif chargé d’éclairer le ministre de l’écologie, voire celui de l’agriculture, sur l’évolution des pratiques et des réglementations concernant la chasse. A priori, la démocratie est en marche. Sauf qu’au CNCFS une écrasante majorité des 28 membres affichent clairement leur sympathie cynégétique.

Pas question, en conséquence, d’espérer une prise de conscience visant à améliorer les pratiques. Les sujets de progrès ne manquent pourtant pas avec, en priorité, le retrait des espèces d’oiseaux chassables alors qu’elles figurent sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Le président de la République s’y était pourtant engagé lors de sa première campagne. Un mandat n’a pas suffi pour tenir parole, probablement.

Revenons à notre CNCFS qui a réuni l’élite de la question cynégétique et quelques protecteurs de la nature, le 29 mars dernier. Dans l’ordre du jour, une question non négligeable, le projet d’arrêté portant approbation du cahier des charges fixant « les clauses et les conditions générales de la location pour l’État du droit de chasse sur le domaine public maritime ». Soyons clairs, il ne s’agit pas d’autoriser les fusils à se soulager durant quelques mois, la décision qui sera prise prochainement par le ministère de l’Écologie s’étendra sur 9 ans!

Où sont les carnets de chasse?

Premier constat, ce délai paraît surréaliste. Alors que la faune flirte avec l’agonie, comment peut-on donner des autorisations pour une période aussi longue? Dans la gibecière du CNCFS on trouve dautres cadavres. Il est, par exemple, imposé aux chasseurs de révéler annuellement leurs prélèvements, ce qui est la moindre des choses pour envisager une gestion rationnelle. Or, le bilan, après une demande insistante des protecteurs, n’a été communiqué que deux heures avant la réunion. Et le tableau de chasse révélé laisse songeur puisqu’aucun bilan n’a été fourni depuis la saison 2018–2019, soit quatre années sans aucune donnée des chasseurs et, par conséquent, sans analyse de la situation.

Rappelons aux porteurs de fusils auto-baptisés « premiers écologistes de France », qu’ils ont obligation à communiquer les prélèvements depuis l’arrêté ministériel du 24 février 2014. Et si l’on cherche des poux aux nemrods, on peut s’amuser de constater que, non seulement les carnets de chasse obligatoires sont en nombre insuffisants au regard du nombre de huttes de chasse, mais moins de 60 % sont retournés, tandis qu’aucune donnée sur les limicoles n’a pu être fournie.

Par ailleurs, le bilan de la saison de chasse 2015–2016 est un vulgaire copié-collé de la saison 2014–2015. Pourquoi se gêner puisque l’administration ferme aimablement les yeux dès lors qu’il faut satisfaire les chasseurs? Pour réveiller les consciences il est bon de rappeler que la France a été condamnée à de nombreuses reprises par le Conseil d’État et quil est sous le coup dune « procédure dinformation » de la part de la Commission Européenne pour laisser chasser des espèces en mauvais état de conservation et avoir ouvert la chasse en période de migration sur le littoral. Autre perle : il autorise une ouverture anticipée sur le DPM (domaine public maritime) et les zones humides dès le premier samedi d’août (en pleine période estivale!).

Un lobbying très efficace

Attardons-nous maintenant sur ce fameux domaine public maritime. Aucune étude d’impact n’a été fournie lors du CNCFS en question pour veiller aux devoirs et aux intérêts de l’État (bilan financier, risques de sous-location, évaluation des accidents ou des incidents, chasse de nuit, modification du trait de côte …). De même, pas une ligne sur la nécessité de garantir les enjeux de protection de la biodiversité (Conservatoire du Littoral, autres politiques de protection, Natura 2000, etc…).

L’AEWA (Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie), dépendant du programme des Nations-Unies pour l’environnement, a été avisé de la situation. D’un naturel plutôt aimable avec le monde de la chasse, l’établissement public international commence à manifester un certain agacement devant la légèreté de l’exécutif français soumis au lobbying cynégétique. Quant aux associations de protection de la nature, trois d’entre elles (France Nature Environnement, Humanité et Biodiversité et la LPO) se sont fendues d’un courrier circonstancié au ministre Christophe Béchu pour lui demander – a minima – de ne pas prendre un arrêté dépassant les 3 ans et de revisiter attentivement la liste des oiseaux destinés à être plombés.

Réponse… dans les jours qui viennent!

Allain Bougrain-Dubourg

 

 

 

 

 

 

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B
Oui c'est dramatique...<br /> Bon WE Jean-Louis
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Z
C'est dramatique ! je n'en peux plus de tous ces crimes autorisés. <br /> Amitiés Jean-Louis
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J
En France tout est fait pour le bien être des chasseurs avec la bénédiction de l’état et de nombre d’élus qui vont de plus en plus porter l’étiquette de criminels. S’attaquer comme ils le font à la nature nuit considérablement à tous les habitants de la planète y compris eux-mêmes et leurs descendances …cherchez l’erreur du côté des neurones!
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