Les facteurs humains traversent la France pour livrer des messages "importants mais pas urgents"
C'est l'antithèse de l'instantanéité dans laquelle nous vivons aujourd'hui. Née à Redon, en Bretagne, l'Agence des facteurs humains livre des lettres, au gré de voyages en mobilité douce. Un peu de poésie et de lenteur qui font du bien.
Vincent Berthelot. Photo : Cécile Bidault/France Inter
C'est à Redon, à la frontière entre la Bretagne et les Pays-de-la-Loire, qu'est née l’Agence des facteurs humains. Ce n’est pas une association, c’est un concept poétique et postal, selon les mots de son fondateur, Vincent Berthelot.
En 2015 au moment de la retraite, cet enseignant souhaite faire un grand voyage à vélo, et il cherche un objectif. Il a alors l’idée de transporter et de livrer des lettres manuscrites, des messages qu’on a envie d’envoyer de manière un peu exceptionnelle. Aujourd’hui, il y a une centaine de facteurs humains à travers la France. Au gré de leurs voyages à vélo, en train, à pied, ils déposent ces plis à leurs destinataires.
"C'est un contrepied total à l'instantanéité"
Vincent Berthelot explique le concept : "si on a envie de faire porter une lettre, on écrit à l'Agence des facteurs humains, et on dit simplement : 'j'habite quelque part, et je veux envoyer une lettre quelque part'. Peut-être qu'un jour, quelqu'un téléphonera pour dire qu'il veut bien venir chercher cette lettre et l'apporter". Et il ne faut pas être pressé : "l'Agence a quelques promesses de messages qui ont plus de deux ans, qui n'ont pas encore trouvé de messager parce que personne ne faisait cette route. C'est un contrepied total à l'instantanéité. On est ailleurs". Tout l’inverse, donc, des mails et des réseaux sociaux.
Plus de 20 000 kilomètres
Vincent Berthelot, qui roule sur un vélo couché, a arrêté de compter les kilomètres à 20 000. Dans sa sacoche rouge où il est écrit “Fragile”, il a porté au moins 200 lettres depuis le début de l’aventure, et ce sont autant de rencontres : "j'ai porté une lettre ce week-end, c'était un tube de pommade, à l'intérieur duquel il y avait un message, une femme qui disait à ses parents qu'elle les aimait, c'était trop sympa".
Dans sa sacoche rouge, Vincent Berthelot transporte des messages "importants mais pas urgents" Photo : Cécile Bidault/France Inter
Le facteur humain a-t-il déjà été tenté de lire les lettres qu'il livre ? "Jamais !" répond-il dans un grand éclat de rire, "j'ai un métier, moi, une éthique !". En revanche, il arrive souvent que le destinataire lui lise la lettre tout juste livrée : "il y a toujours de l'émotion, je pleure souvent".
Et si le facteur trouve porte close ?
Ces lettres livrées à domicile sans prévenir sont, la plupart du temps, l’occasion de retisser des liens avec des gens que l’on a perdus de vue. Blandine a déjà fait appel plusieurs fois à l’Agence des facteurs humains. Selon elle, pour certains messages, rien ne vaut une vraie lettre : "il y a un style, ça reflète la personne, alors qu'avec les SMS on fait au plus court". Le fait de ne pas savoir quand arrivera le message n'est pas un problème : "comme dit Vincent, c'est important mais pas urgent".
Michel, qui a déjà fait livrer deux lettres, s'apprête à devenir à son tour facteur humain : "rien qu'une fois connaître cette émotion de frapper à la porte et de dire : 'quelqu'un pense à vous et a souhaité vous remettre une lettre'. Et si la personne n'est pas là, j'ai compris que ce n'était pas très grave, parce que le facteur sonne toujours trois fois, il revient !".
Il reviendra quand il pourra, et peut-être en chantant une chanson d’Anne Sylvestre, "Les chemins du vent", presque un hymne pour l’Agence des facteurs humains. Si vous souhaitez faire appel à l'Agence des facteurs humains, voici la liste des prochaines routes empruntées.
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