Le nitrate d'ammonium en France, bombe à retardement
On se souvient de la catastrophe de l’usine AZF à Toulouse le 21 septembre 2001, qui avait fait 31 morts. Mais aussi l’explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020, qui avait soufflé la ville et tué plus de 200 personnes. Le point commun entre ces accidents majeurs, c’est le nitrate d’ammonium.
Le nitrate d’ammonium en France, une bombe à retardement. Ici stockage en 2001 de la SMG. Photo : Philippe Renault
C’est la détonation d’un stock de ce produit, entreposé dans l’usine toulousaine et dans le port libanais, qui a provoqué les explosions. Ce nitrate d’ammonium est surtout utilisé comme un engrais, qu’on appelle ammonitrates, et qu’on répand sur les champs pour les fertiliser. Il est très explosif, très dangereux, à tel point que de nombreux pays ont décidé de rendre ses conditions très drastiques ou carrément de l’interdire, comme l’Allemagne, la Turquie, la Chine, la Belgique, l’Inde ou encore le Royaume-Uni. Mais pas la France ! Bien au contraire : nous sommes aujourd’hui le deuxième consommateur mondial de cet engrais.
On en produit plus d’un million de tonnes, et il existe des sites de stockage partout en France
Combien et où précisément ? Impossible de le savoir. Un rapport du Sénat daté de juillet 2022 indique, je cite, que « la collecte de données fiables et précises sur les flux d’ammonitrates haut dosage en France est difficile en l’absence d’un système centralisé de suivi du trafic des matières dangereuses ».
Dans notre pays, la réglementation stipule qu’il est possible de stocker sur un seul site jusqu’à 250 tonnes d’ammonitrates haut dosage sans avoir à en informer les pompiers, le maire ou les voisins. Or, à Toulouse, un stock d’à peine 20 à 120 tonnes avait suffi à provoquer l’explosion meurtrière de l’usine AZF. Cela veut dire que vous vivez peut-être à côté d’une potentielle bombe, sans le savoir.
En théorie, ces sites doivent être sécurisés. Mais la réalité est moins rassurante… Le spécialiste des risques industriels Paul Poulain a pu entrer avec le média Vakita dans un site de stockage appartenant à une coopérative, situé en Seine-et-Marne, à proximité immédiate d’habitations.
En principe, l’entrepôt doit être fermé en dehors des heures d’ouverture et aucune personne extérieure à l’entreprise ne doit pouvoir y pénétrer. Or, Paul Poulain a pu accéder directement au stock d’ammonitrates, sans aucune difficulté. Il aurait pu se servir, charger une camionnette, et repartir avec des centaines de kilos de cet engrais hautement explosif.
Vous voyez le problème ?
Une personne mal intentionnée pourrait en faire un usage terroriste, comme ce fut le cas à Oklahoma City en 1995, où une bombe fabriquée avec du nitrate d’ammonium par un terroriste d’extrême droite avait tué 168 personnes. Cerise sur le gâteau, si j’ose dire, Paul Poulain a constaté que le système de protection contre les incendies était défectueux dans l’entrepôt de stockage en Seine-et-Marne. Bref, le constat est très inquiétant et une question se pose : faut-il continuer à produire et stocker en grande quantité ce produit hautement explosif ?
Hugo Clément, en toute subjectivité
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