Pauvre Fouine, ces bêtes que l’on moleste sans vergogne…

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Il est loin le temps où Albert Schweitzer faisait l’unanimité dans nos rangs, où il était notre maître à penser, celui auquel nous nous référions en naturalistes protecteurs, et où porter atteinte à la vie d’une bête libre passait pour un acte de barbarie.

La fouine de François Steimer. (Cliquez pour agrandir)

La fouine de François Steimer. (Cliquez pour agrandir)

Die Ehrfurcht vor dem Leben(Le respect de la Vie…)

Les mentalités ont certes changé mais sans pour autant avoir évolué. Bon nombre de règles visant à préserver les espèces, du moins certaines d’entre elles, ont vu le jour et cela est tant mieux. Parallèlement, hélas ! Le sens du sacré et celui de la magie qui auréolaient à nos yeux le vivant se sont largement estompés, pour ne pas dire qu’ils ont tout simplement disparu. Ce qui bien entendu n’est pas sans répercussions sur les relations que nous entretenons avec les autres vivants, avec qui nous partageons la Terre.

Soir de juin sur la ville apaisée… Harmonie vespérale soudainement interrompue quand, par la fenêtre ouverte, à ma grande surprise, j’aperçois une Fouine tapie au pied du grand Ginkgo biloba de ma cour. Scène parfaitement insolite par grand jour. Après quelque hésitation, la bête se lève et, par petits bonds saccadés, péniblement, se met à clopiner vers le jardin. Là, elle s’agrippe au grillage à croisillons, qu’à grand-peine elle réussit à escalader. Au bout de deux tentatives, elle parvient enfin à se hisser sur le haut de la clôture puis finit par basculer dans le dense massif de Fougères plumes d’autruche qui prospère en contrebas.

En dépit de son état, son instinct lui aura permis de gagner la zone refuge où, temporairement, elle est à l’abri des chiens et des autos d’alentour. Le temps de lui descendre une gamelle de pâtée pour chat, que déjà la voici disparue. Gamelle vidée aux trois quarts à la tombée de la nuit ; gamelle volatilisée au lever du jour.

En l’absence d’observation directe, je ne puis évidemment me prononcer quant à l’identité du mangeur. Bête non revue le lendemain. Œufs mis à disposition à la tombée de la nuit. Œuf frais intouché, œuf dur sans sa coque disparu au matin.

Un voisin, adepte des promenades nocturnes canines, me signale avoir croisé récemment semblable bête en une rue parallèle. S’agit-il du même individu ou d’un autre malchanceux du même acabit ? Je ne saurais le dire…

Qui fait sa connaissance ne peut que tomber sous son charme. Sa volubilité et sa souple ondoyance, son élégante et incarnée perfection mais également son évanescente présence nous rendent la Fouine plus que précieuse. Voir celle de mon proche voisinage, la mienne, ainsi diminuée et en souffrance m’est insupportable et m’attriste profondément.

Empoisonnée ? Piégée ? Blessée par une volée de plombs de chevrotine ? En tout cas mutilée ! Mutilée par la connerie humaine, par l’inhumanité d’un imbécile adepte de l’orthodoxie bien-pensante qui scinde le vivant en espèces utiles et nuisibles.

Meurtrie par la cruauté d’un sinistre abruti que protège une règlementation d’un autre âge. Que n’a-t-on clamé à qui veut l’entendre que les animaux sont des êtres sensibles qui méritent notre attention et nos égards ! Sans que pour autant quoi que ce soit n’ait réellement changé.

Du pharisianisme à l’état pur ! 

La destruction des Mustélidés (Belette, Hermine, Fouine, Martre, Putois, Blaireau), le déterrage et la mise à mort des Blaireaux en tant qu’activité de loisir et sous forme de compétition sportive, la contamination des chaînes alimentaires par la mise à disposition en pleine nature de poisons fluidifiants à large spectre (Brodifacoum, Bromadiolone, Difénacoum, Diféthialone), le piégeage au moyen d’instruments et de techniques générant d’intolérables souffrances animales, non seulement continuent mais semblent avoir de beaux jours devant eux.

Au pays des Droits Humains, ex Droits de l’Homme et du Citoyen, hormis en la parole publique et ses déclarations fallacieuses, ceux des animaux ne sont pas prêts d’avoir le vent en poupe !

Quand je pense aux Putois que piégeait en toute légalité un propriétaire d’étangs du proche Sundgau, alors que le Putois est le seul prédateur du Rat musqué, qui à pareille époque pullulait en son domaine…

Au Renard, qui bon an mal an élimine entre 5000 et 10 000 rongeurs ravageurs de cultures, auquel chasseurs et paysans vouent une haine atavique et contre lequel ils mènent une lutte acharnée…

À la Fouine, redoutable prédateur du Rat brun ou Surmulot en milieu urbain, au Faucon crécerelle, aux Chouettes effraie et hulotte, victimes collatérales par ricochet des poisons ingérés par leurs proies contaminées…

La destruction et la régulation de la petite faune de nos villes et de nos campagnes sont des sujets tabous sinon polémiques, quand ils émergent au grand jour. Mais quoi qu’il en soit, leur pratique se poursuit gaillardement, en catimini bien entendu, et avec le lâche et complice acquiescement de certains d’entre nous.

Le tout sur fond de discours lénifiants et vertueux à la gloire du développement durable, de la préservation de la biodiversité, de la transition écologique et climatique, de la sauvegarde de la planète et j’en passe !

Discours électoraux ou de circonstance, discours d’autosatisfaction ou de propagande, en tout cas discours d’endormissement des consciences afin d’occulter les innombrables exactions en cours et le saccage chronique du peu de nature sauvage qui nous reste encore.

N’oublions pas, ce n’est pas en flinguant quelques Tadornes casarcas, quelques Ouettes d’Égypte ou autres Bernaches du Canada, espèces exogènes indésirables bannies par le cercle des experts et les instances officielles, que nous ressusciterons nos belles espèces perdues et ré-enchanterons nos milieux naturels anéantis. Les lois du vivant s’avèrent bien plus complexes et plus subtiles que ne saurait l’imaginer le génie si peu écologique de nos brillants gestionnaires de faune. 

À chacun chacune de se positionner, de fixer clairement les limites de son acceptance. À chacun chacune de placer son curseur, de choisir en âme et conscience son camp. À chacun chacune, aussi et surtout, de prendre son bâton de pèlerin.

Afin que revive et survive la Vie !

Edmond Herold

 

 

 

 

 

 

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F
Merci pour ce beau texte, ode à la vie sous toutes ses formes et qui nous enjoint à apprécier sa diversité et à la respecter.<br /> Ne soyons tout de même pas jusqu'au-boutistes. Quand une ou plusieurs de ces charmantes bestioles ont élu domicile dans le votre ; quand vous avez des combles aménagées inaccessibles (par les humains) dont il est quasi-impossible de les faire déguerpir ; quand elles créent des dommages matériels importants et nuisent fortement au sommeil de votre famille ... parfois l'action léthale s'avère être la seule option raisonnablement envisageable.
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Z
Tout est bien dit! La lutte
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Z
Commentaire parti inachevé ! je voulais dire que la luute acharnée contre le vivant est une constante et ce n'est pas le nouveau ministre de l'Agriculture chasseur à l'arc qui va enrayer cela ; https://www.politique-animaux.fr/marc-fesneau?fbclid=IwAR0TQV-PSGXYXAtHmYbGojq26kC_dwZYbVgC2jV9FYILW9zBVt09Ic_U7vw
J
Si je publie volontiers les textes d'Edmond c'est qu'à chaque fois il tape dans le mille : des textes à la fois simples et toujours emplies de poésie, tout ce que j'aime en fait !<br /> Merci donc à cet auteur inconnu de moi mais ami de mes chers Gill et François qui, à chaque fois, me transmettent les écrits d'Edmond ! C'est un bonheur que cette chaîne de sympathie et de bienveillance ! Merci à tous...
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J
Bravo et Merci. Que dire de plus et de mieux.? Bienveillance et respect pour nos frères animaux. Attention à notre espèce: la joie et vla paix ne peuvenbt naitre de la cruauté
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D
Très beau et vive la Vie !
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S
merci et bonne suite. JC S
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M
Superbe texte tout est dit et bien dit. .
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