La part du sauvage
Protéger un pré fleuri, entretenir une lande à orchidées, bichonner une station de plantes rares… Sauvegarder une espèce qui bat de l’aile, de surcroît si cette dernière est rare ou prestigieuse… Sauver du naufrage le Tigre du Bengale ou un minuscule Coléoptère de France … La plupart d’entre nous y adhère…
/image%2F1972810%2F20220105%2Fob_f78e52_270496443-10223031666872349-thierry-ba.jpg)
La part du sauvage, ici magnifiquement illustré par Thierry Badan dont je vous invite à découvrir d’autres photos ICI !
Mais aimons-nous vraiment la nature ? Lui faisons-nous confiance ? Lui reconnaissons-nous son génie, son intelligence créatrice, ses potentialités ? Pas si sûr que cela !
La plupart des espèces menacées de par le vaste monde le sont par l’action de l’homme. Les préserver consiste avant tout à lever le pied, à cesser de les anéantir ou de détruire leurs milieux de vie, à limiter notre emprise, à réduire notre impact sur leurs territoires.
La remarque s’applique tant à l’échelle locale que globale. Et comme toujours, plutôt que de nous ériger en maîtres à penser ou en péremptoires donneurs de leçons, il nous faut commencer par nous mettre en phase avec les grands thèmes que nous prônons à longueur de temps, à savoir ceux du développement durable et de la sauvegarde de la biodiversité, autrement dit par mettre nos actes en concordance avec nos paroles.
En ses lieux de vie ordinaires, chacun, chacune d’entre nous, selon sa sensibilité, entretient des relations privilégiées avec le monde qui l’entoure. Chacune, chacun, à son échelle personnelle, mais aussi selon la marge de manœuvre dont il dispose, a le loisir d’agir sur son environnement ou, en connaissance de cause, d’y renoncer délibérément. Rappelons ici un us cher à nos amis anglo-saxons au feeling pour le vivant viscéralement ancré, qui consiste à réserver un coin de son jardin aux ‘’Devas’’, ces subtils esprits de la nature qui ne sont perceptibles qu’à ceux qui leur accordent leur virtuel droit d’existence.
Us tout autant bénéfique à la foule grouillante des insignifiantes petites bêtes du menu peuple de l’herbe, qui du coup échappent aux fatales pales de la tondeuse et aux outils ravageurs du jardinier. Difficilement recevable, j’en conviens, pour des cartésiens au rationalisme aigu et à défaillante sensibilité pour le vivant !
L’on comprendra bien que dans un square ou un parc urbain, la nature jardinée, les aménagements et les équipements de loisirs -places de jeux, aires de pique-nique, mobilier urbain pour la détente ou la culture physique, guinguettes (avec toutes mes réserves) et panneaux d’information- trouvent leur place. Certes avec modération et dans les limites du raisonnable, mais sans excès cependant, car ici, comme en toute chose, le mieux est l’ennemi du bien.
À l’inverse, les ultimes îlots de nature spontanée, les espaces sauvages intouchés, miraculeusement épargnés, subsistant dans la cité et en sa périphérie, ont tout naturellement vocation à assurer leur fonction de zone refuge pour la flore et la faune. Qu’ils soient considérés à juste titre comme de précieux havres de paix où la nature non entravée peut s’exprimer librement et qu’ils soient conservés en l’état pour le plus grand bonheur des promeneurs et autres curieux de nature !
On l’aura compris, en nos milieux anthropisés, la survie de nos espèces animales et végétales passe par le maintien d’espaces non soumis à gestion, sur lesquels la nature et le sauvage règnent en maîtres. Plus nous laisserons de place à ces derniers, plus riche sera notre biodiversité.
Pardon pour cette lapalissade ! Accorder sa part au sauvage, c’est affirmer notre foi en la chance, c’est croire en la potentielle bienveillance du hasard, à l’imprévisible et à l’imprévu, au miracle, au rêve et à la fantaisie, à la Vie tout court et aux lendemains qui rechanteront.
Edmond Herold
Vous voulez protéger la nature ? Fichez-lui la paix ! François Terrasson (Saint-Bonnet-Tronçais 1939 - Paris 2006)
Si vous avez apprécié cette publication,
partagez-là avec vos amis et connaissances !
Si vous souhaitez être informé dès la parution d’un nouvel article,
Abonnez-vous !
C’est simple et, naturellement, gratuit !