Les chevreaux du Hohneck dans le viseur de René Claudel
Le soleil commence à réchauffer de ses rayons les rochers du massif du Hohneck. L’ancien moniteur de ski René Claudel (1), aujourd’hui photographe animalier amateur, avance vers les couloirs où les chamois trouvent refuge. D’un regard, il a déjà repéré les petits, appelés chevreaux.
Les cabris et leurs mères sont visibles en cette fin de printemps dans le massif du Hohneck. Photo : VM /Jérôme Humbrecht
Son studio photo, c’est la nature. Le sexagénaire y va sans détour. Appareil photo posé sur l’épaule, René Claudel avance bon train depuis la route des Crêtes à travers les hêtraies d’altitude. Il n’est pas encore 7 h, les rayons du soleil commencent à peine à caresser les sommets vosgiens. Au milieu de la lande tapissée de brimbelliers et d’anémones sauvages, un chamois s’aventure à découvert. Lentement, l’observateur pose le monopode sur lequel son appareil est fixé.
« Partager la vision du beau »
Il poursuit son chemin vers la crête. « Quand on arrive au Hohneck, on est chez les chamois. Ils ont une très mauvaise vue mais sont sensibles aux mouvements et au bruit », indique-t-il. Avant d’aller observer les femelles et leurs petits, la contemplation du photographe amateur va se diriger vers la « resserre », les rochers de la Martinswald sur lesquels les chamois se réchauffent aux rayons du soleil levant. Une poignée de photographes matinaux profitent de l’instant.
« Le but de ma démarche, c’est de partager ma vision du beau en toute simplicité, sans perdre de vue qu’il est fragile et éphémère », confie à voix basse l’ancien moniteur de ski. Dans la terre du sentier de randonnée que le photographe emprunte, il a repéré des traces de sabot. Le spécialiste a l’œil. Retraité de l’industrie, René Claudel se passionne pour la photographie après le décès de son épouse en 2011. « Il fallait que je trouve une occupation. »
Dans son viseur, René Claudel aime observer le plateau des Mille-Etangs et les petits chamois du Hohneck. Photo : VM /Jérôme Humbrecht
Des lumières du plateau des Mille-Etangs aux chamois du Hohneck, l’amateur a déjà publié quatre livres et réalisé de multiples expositions. « Pourtant, il m’est déjà arrivé d’être face à plusieurs troupes. Dans ces moments-là, la fascination est telle qu’on oublie de prendre de photos », raconte celui qui a déjà fait face à un groupe d’une quarantaine de chamois. Mais en ce mois de juin, l’objectif est sans équivoque : aller voir la nursery. Comme un rituel, face à la pointe des Trois-Fours, à la levée du jour, le photographe observe les petits et leurs mères. « Ils sont nés entre mai et juin. ». Les cabris vont bientôt devenir de jeunes éterlous. En contrebas du sommet du Hohneck, sept petits et leurs mères dorent au soleil.
À partir de fin mai, il est possible d’observer les petits chamois et leurs mères au Hohneck. Photos : VM /Jérôme Humbrecht
« En général, on compte deux ou trois cabris par portée. C’est une question de patience, on ne les voit pas toujours. » Une question d’observation surtout. Le pelage des chamois se fond dans la couleur de la terre et des rochers. Les petits sautillent. Un coup de museau vers les mamelles de la mère. L’heure de la tétée est arrivée. Sur le coteau d’en face, quelques photographes et randonneurs du matin observent. D’un bond, la mère s’éloigne pour aller brouter à côté. « Elle a besoin de reprendre de l’énergie. Les petites boules de poils, c’est un plaisir de voir ça. Maintenant, je prends moins de photos. J’observe leurs postures particulières. » Face à cette merveille de la nature qui s’offre là chaque printemps, le temps semble s’être arrêté. La dureté de la lumière et la fréquentation grandissante du site montrent que l’heure avance. À 8 h, le soleil brille tellement qu’il est trop tard pour les photographies… Mais selon l’amateur, les plus belles images restent celles qu’il a gravées dans sa tête.
Heidi Joffroy et Jerome Humbrecht/Vosges Matin (03.07.2021)
Ils sont 1 500 dans le massif des Vosges
Dans le massif des Vosges, le chamois a été réintroduit en 1956. Dans le massif du Jura, une petite colonie a survécu au pied du château de Joux. Le chamois est le plus petit des caprinés (il fait partie du groupe des moutons et des bouquetins). Il peuple depuis des siècles les massifs de Lorraine et de Franche-Comté. Dans les Vosges, si l’animal y est présent depuis au moins le VIIIe siècle -ils sont, aujourd’hui, pas moins de 1 500, selon des ossements qui ont été retrouvés- le braconnage et des prédateurs comme le loup et le lynx avaient eu raison du mammifère. Il y avait totalement disparu jusqu’au milieu des années 1950. Dans le Haut-Doubs, une petite colonie a survécu aux prédateurs…
- Je vous ai présenté René Claudel que j’ai eu le plaisir de rencontrer à l’occasion de la visite du Jardin de la Ferrière au ‘’Pays des Mille Etangs’’ (voir ICI).
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