Journal du reconfinement/Acte 3 ‘’Classé nuisible’’
Nuisible se dit d’une espèce animale dont la présence cause des dommages, en particulier à l’agriculture. Depuis un décret de 2012, un arrêté ministériel, revu tous les 3 ans, détermine dans quels départements renard, fouine, martre, belette, putois, corbeau freux, corneille noire, pie bavarde, geai des chênes et étourneau sansonnet seront classés sur la liste noire et ainsi livrés à la merci des gourdins et des fusils…
Classé ‘’nuisible’’ (désormais on dit ‘’Espèce susceptible d’occasionner des dégâts’’) le renard continue à être ‘’détruit’’ quasiment toute l’année… Photo : Jean-Louis Schmitt (Cliquez pour agrandir)
Avec une consommation de de 3 000 à 5 500 campagnols par an, les renards limitent leur rôle de ravageur vis-à-vis des céréales et des prairies mais aussi de la forêt en s’attaquant aux campagnols sylvestres (report de prédation). Agriculteur à Chapelle-d’Huin, près de Pontarlier, Michel Pritzy avance même des arguments économiques : « Dans notre ferme familiale où nos vaches produisent du lait à comté, nous avons une obligation de pâturage et notre ennemi, c’est le campagnol qui, lorsqu’il prolifère, réduit les prairies à du caillou. » Les chiffres parlent d’eux-mêmes : toute pullulation de campagnols représente jusqu’à 10 000 € de perte par exploitation. Or, les traitements s’étant avérés inefficaces et même dangereux pour les terres (et donc l’appellation AOC), Michel Pritzy a pris conseil auprès de certains anciens qui lui ont demandé de ménager les renards (ou l’hermine, plus rare). « Et quand je croise un renard, je lui dis merci pour le boulot qu’il fait en éradiquant les campagnols, protégeant ainsi nos récoltes sans avoir besoin de produits chimiques. »
Très peu de dégâts auprès des éleveurs
Contrairement à ce que croient certains éleveurs, les renards ne s’attaquent pas aux agneaux, chevreaux et autres veaux nés dans les prairies. En revanche, ils jouent un rôle d’épuration en débarrassant les placentas.
Quant à la réputation des renards « mangeurs de poules », s’il existe, il est dérisoire, car ils ne s’attaquent pas aux grands élevages avicoles protégés de toute forme de prédations extérieures. Certes, ils peuvent croquer quelques volatiles ici où là, mais dans des élevages dits familiaux, dont les parcs et les poulaillers sont le plus souvent inexistants ou inadaptés.
Equarisseur gratuit, mais également mésoprédateur équarisseur
En hiver, les renards sont souvent dépendants de cadavres (animaux écrasés ou mort de faiblesse ou de maladie). Ils assurent ainsi des fonctions d’équarrissage. Leur capacité de report de prédations se tourne, suivant la pullulation de rongeurs qui reste leur bol alimentaire principal, vers des proies moins nobles. Plus généralement, les renards éliminent dans la nature les individus malades, faibles, blessés, évitant pullulations et épidémies. Cette sélection contribue à l’assainissement des populations des autres espèces. Ils jouent également un rôle dispersif par rapport à certaines proies (lapins), les empêchant ainsi de détruire totalement leur environnement.
Le renard joue aussi un rôle de dissémination de graines !
Les renards roux complètent leur régime alimentaire notamment par des fruits et des baies quand ces ressources sont abondantes. Il est facile d’ailleurs de le constater en observant des crottes de renard à certaines périodes de l’année. Ils jouent un rôle important dans la dissémination des graines et contribuent à la diversité des arbres et arbustes des paysages ruraux Certaines de ces espèces végétales qu’ils disséminent ont par ailleurs non seulement une valeur paysagère et patrimoniale mais également une valeur économique si l’on considère par exemple le prix du bois de merisier. Le renard roux rend, là encore, un service écologique appréciable.
Le renard, vecteur de santé
La maladie de Lyme est transmise à l’homme via des tiques qui ont été contaminées par des micromammifères porteurs de la maladie tels que les campagnols ou les mulots. A travers leurs activités de prédation sur ces micromammifères, le renard, la fouine ou l’hermine permettent de limiter la propagation de la maladie de Lyme chez l’homme. « Plus il y a de renards, plus les campagnols, porteurs potentiels de la maladie, ont peur et se tiennent en sous-sol », explique Fabien Gréban, photographe animalier professionnel « de sorte qu’ils sont moins infectés par les tiques. D’où des risques nettement plus faibles pour l’homme de contracter la maladie. » C’est aussi la conclusion de deux études conduites l’une aux Etats-Unis, l’autre en Hollande… (Source : Animal Cross)
Le renard est chassé plus de dix mois sur douze et piégé toute l’année. 600 000 à un million d'individus sont tués chaque année en France. Loin d’être anecdotique, l’intérêt et la cohérence d’un tel abattage posent question. Le renard roux est-il un nuisible? Par qui, pourquoi et quelles conséquences pour ce prédateur ?
‘’Classé nuisible’’ est un film d'étude réalisé par Isabelle Dailly de 18'15 (à voir ci-dessous)
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