Au contact de l'humain, les proies perdent rapidement leur crainte des prédateurs

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Les comportements anti-prédateurs sont rapidement délaissés lorsqu'une proie entre en contact avec l'humain. Une nouvelle étude montre que ce changement est très rapide…

Dans un environnement urbain, les proies perdent rapidement leur vigilance face aux prédateurs. Photo : Pixabay (Cliquez pour agrandir)

Dans un environnement urbain, les proies perdent rapidement leur vigilance face aux prédateurs. Photo : Pixabay (Cliquez pour agrandir)

La proie se sent en danger. Elle peut attendre et rester vigilante tout en continuant son activité, s'immobiliser ou encore fuir. Mais une étude publiée le 22 septembre 2020 dans la revue PlosBiology révèle que ces comportements, pourtant vitaux, sont rapidement délaissés lorsque l'animal entre en contact avec l'humain. Cette recherche menée par une équipe internationale a été dirigée par le Français Benjamin Geffroy de l'Université de Montpellier.

102 espèces étudiées

Pour en venir à une telle conclusion, les auteurs de l'étude ont repris les résultats obtenus par 173 recherches précédentes concernant les stratégies anti-prédatrices des animaux. Elles recoupent un ensemble d'informations sur 102 espèces (mammifères, oiseaux, reptiles, poissons et mollusques) dans trois contextes différents : la captivité, la domestication et l'urbanisation. Pour les animaux domestiqués ou captifs, la menace représentée par les prédateurs est réduite voire inexistante (elle est néanmoins présente par exemple dans le cas d'un troupeau de moutons). Et un environnement urbain permet aussi un relâchement de la pression de prédation ce qui permet aux proies de conserver leur énergie non pas pour surveiller ce qui les entoure mais pour rechercher de la nourriture ou pour se reproduire.

Dans les trois contextes étudiés, une réduction des comportements anti-prédateurs a été observée dès la première génération, "les changements les plus rapides se produisant lors de l'exposition initiale à l'Homme", notent les auteurs. Simultanément la variabilité entre les individus augmente initialement puis diminue progressivement, génération après génération. Les chercheurs expliquent ce phénomène par la sélection artificielle, l'être humain recherchant la docilité des animaux.

"Ici, nous montrons que les animaux urbanisés perdent également leur capacité à répondre aux prédateurs d'une manière qui est similaire aux animaux qui passent par le processus de domestication, bien qu'à un rythme plus lent (trois fois moins rapidement, ndlr), souligne l'étude. La même tendance a également été constatée pour les animaux en captivité", avec des changements encore plus lents. Mais chez ces derniers, le résultat n'était pas statistiquement significatif. Les données analysées révèlent également que les herbivores changent de comportement plus rapidement que les carnivores et que les animaux solitaires changent plus rapidement que ceux qui vivent en groupe.

Une perte comportementale dangereuse 

La perte de ces comportement chez les animaux maintenus en captivité pour être réintroduits dans la nature peut être la plus dramatique. Ces changements peuvent survenir si rapidement que les auteurs de l'étude appellent les scientifiques chargés de ces réintroduction à prendre des précautions pour éviter une forte mortalité des animaux relâchés, par exemple en les "rééduquant" ou en les exposant à des prédateurs avant qu'ils ne retournent dans la nature. Et "il est important de se rappeler que les réponses des animaux aux changements anthropiques sont souvent inadaptées et peuvent créer des pièges évolutifs et écologiques ou être insuffisantes pour surmonter les nouvelles pressions de sélection", précisent les chercheurs. Une telle perte comportementale peut devenir, sur le long terme, plus dangereuse même que l'attaque d'un prédateur.

Anne-Sophie Tassart/Sciences & Avenir (23.09.2020)

 

 

 

 

 

 

 

 

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Publié dans Animaux, Insolite

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O
C'est tout à fait étonnant. Au contact de mes semblables je sens souvent monter en moi des pulsions d'une sauvagerie inouïe. Il faudra que je me surveille.
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C
Ouais! Que peut-on y faire? D'un côté, on veut sauver les animaux, de l'autre, ça ne les aide pas? Pas évident! Bonne semaine!
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B
La photo est superbe...<br /> L'homme a vraiment un effet dévastateur... Toute la nature en est chamboulée...
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