Sauver le saule têtard, une urgence absolue
J’ai grand plaisir à partager cet article paru dans notre quotidien régional : on retrouve cette fois notre ami François au chevet des saules têtards : ‘’militant un jour, militant toujours’’ ai-je envi d’ajouter ! Retrouver l’article complet et une vidéo sur le site des DNA…
Le naturaliste François Steimer et le maire de Blaesheim, Jacques Baur, défendent la préservation de l’étonnant saule têtard, non seulement pour sa valeur patrimoniale, mais aussi parce qu’il constitue un extraordinaire îlot de biodiversité. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Sauver les saules têtards est une « urgence absolue » en Alsace, alerte le naturaliste François Steimer, profitant du fait que 2020 ait été déclarée « année des trognes », selon le terme employé ailleurs en France pour désigner les arbres « traités en têtard », c’est-à-dire périodiquement écimés jusqu’à faire grossir la « tête » du tronc.
Car la disparition de ces arbres au port insolite, essentiellement des saules liés aux paysages des bords du Rhin et des rieds humides, dont ils contribuent à fixer les berges, risque fort de s’accélérer dans les prochaines années. Non seulement ceux qui n’en voient plus l’utilité les abattent, mais surtout, ils ne sont plus entretenus.
« On sera obligé de faire appel à un bûcheron, cela va être un problème. Dans le temps, les anciens s’en chargeaient, ils le taillaient tous les dix ou quinze ans, pour récupérer le bois de chauffage, mais cela n’intéresse plus les habitants, et les travaux sont assez dangereux », témoigne Jacques Baur, le maire de Blaesheim, village qui compte une centaine de beaux saules argentés des plus communs, plantés en bordure de prairies ou le long de l’étang de pêche du Hanfbach. Les branches d’autres variétés étaient appréciées des sabotiers, ou encore des vanniers.
« Un arbre rempli de vie »
Or, souligne François Steimer, laisser désormais pousser ces saules têtards revient à « les laisser crever » : en cas de vent ou de gel, leurs branches trop lourdes risquent de tomber, de fendre le tronc et de le faire s’écrouler. Au-delà d’un patrimoine vert « qui a toujours été là » dans le Bruch de Blaesheim, et que Jacques Baur, ancien agriculteur-choucroutier, tient à préserver, les saules têtards constituent parmi les derniers petits îlots de biodiversité.
Plus ils sont vieux, plus ils se creusent et, au cœur même des troncs, dans le riche terreau issu de leur décomposition et autrefois recherché pour les jardins, diverses autres espèces végétales, comme le sureau, peuvent y pousser.
« C’est un arbre rempli de vie, décrit François Steimer. Tout un monde végétal et animal trouve refuge dans ses anfractuosités. Il attire énormément d’insectes et d’oiseaux, comme la mésange des saules, le grimpereau, qui viennent y chercher de la nourriture, ou de petits mammifères, des batraciens, des hérissons et chauve-souris… Le canard colvert y pond ses œufs et les petits plongent ensuite directement dans l’eau. » C’est même l’un des rares exemples où « l’intervention de l’homme a augmenté le potentiel de diversité».
François Steimer, avec les communes qui en ont la responsabilité et ne doivent pas être laissées seules ».
Convaincu que « pour sauver ces arbres anciens, il faut s’adapter », il suggère de faire appel à des engins mécaniques, du moins là où les saules têtards sont facilement accessibles. De « sérieuses » discussions en cours pourraient aboutir à ce que des partenaires institutionnels subventionnent ces travaux d’étayage. Les bois dégagés pourraient ensuite être vendus à des industriels et transformés pour servir, par exemple, à des chaufferies, ou comme litières pour animaux.
Enfin, suggère François Steimer, cette aide apportée aux communes devrait être conditionnée au replantage de jeunes saules, à traiter également en têtard, simplement en plantant une branche à un mètre de profondeur, de façon à ce qu’elle prenne racine. « Il y a de l’espoir, assure-t-il, les deux départements alsaciens sont soucieux de conserver les arbres remarquables, et ceux-ci le sont : leur silhouette tourmentée a même inspiré beaucoup d’artistes. »
Catherine CHENCINER/DNA (04 août 2020)
Du sureau a poussé sur la tête de ce saule têtard, comme l’indique le naturaliste François Steimer. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Le maire Jacques Baur tient à la préservation de ce patrimoine du Bruch, zone humide autour de Blaesheim. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Paysage typique du Bruch : des prairies humide entrecoupées de taillis et des saules têtards plantés en limite de chemin. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Un bel exemple de saule taillé en têtard il y a sept ou huit ans. Dans quelques années, il faudra recommencer. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Les anfractuosités des saules têtards sont des réservoirs de vie animale et végétale. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Le long de ce beau sentier près de Blaesheim, les saules têtards servent de tuteurs au houblon et au liseron, tandis que d’autres plantes poussent à l’intérieur. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Il est difficile de déterminer l’âge des saules têtards, mais certains, dont le tronc a plusieurs mètres de diamètre, sont plus que centenaires. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Même s’il est fragilisé en cas de vent ou de gel, le saule têtard au tronc fendu continue à faire des rejets. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
Les saules têtards à l’insolite silhouette ont inspiré les artistes et l’imagination populaire en a fait des arbres magiques, comme l’a rappelé le Dr Pierre Schmidt, naturaliste alsacien. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
À Blaesheim, le long de l’étang de pêche du Hanfbach, les saules têtards argentés, variétés les plus communes, font partie du paysage. Photo L’Alsace /Thierry Gachon (Cliquer pour agrandir)
S’adapter à la modernité
Les associations de défense des milieux naturels s’efforcent donc de trouver aux saules têtards « une deuxième vie ». « Il faut ouvrir la réflexion et que le public s’en empare, plaide François Steimer, avec les communes qui en ont la responsabilité et ne doivent pas être laissées seules ».
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