Le parc national des Calanques demande 450 000 euros à des braconniers pour préjudice écologique

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Il s’agit du premier dossier pour préjudice écologique – une notion inscrite au code civil depuis 2016 – à être jugé devant un tribunal en France, selon l’avocat du site.

Le parc national des Calanques, près de Marseille, dans le sud de la France, en février 2018. Photo : Anne-Christine Poujoulat/AFP

Ils avaient chassé illégalement des tonnes de poissons dans les Calanques. Le parc national a demandé, vendredi 8 novembre, 450 000 euros pour « préjudice écologique » à quatre braconniers des mers, qui comparaissaient au civil à Marseille. Il s’agit du premier dossier pour préjudice écologique – une notion inscrite au code civil depuis 2016 – à être jugé devant un tribunal en France, selon l’avocat du parc, Sébastien Mabile. L’avocat général a renchéri :

« La demande du parc national est légitime et je demande au juge de faire valoir le principe du droit dans ce dossier historique. »

En juillet 2018, les quatre apnéistes marseillais avaient été jugés au pénal et condamnés à des peines allant de quinze à dix-huit mois de prison avec sursis, pour avoir chassé au harpon illégalement pendant plus de quatre ans dans les eaux protégées des Calanques. M. Mabile a rappelé que 4,5 tonnes de poissons et coquillages avaient été prélevés illégalement, ce qui a provoqué « un retour en arrière de trois à quatre ans par rapport à l’effet réserve sur la biomasse ». Cet « effet réserve », a-t-il expliqué, définit l’augmentation de la biomasse dans les zones de non-pêche.

Un impact sur l’ensemble de la chaîne alimentaire

A la barre vendredi, une directrice de recherche émérite du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), ancienne membre du conseil d’administration du parc des Calanques, Denise Bellan-Santini, s’est désolée de ce que les braconniers s’attaquent notamment à des prédateurs comme le mérou, dont dépend tout un écosystème.

« Quand un braconnier tire un mérou de 10 kg, l’impact sur l’ensemble de la biomasse est multiplié par dix », a-t-elle estimé, car la présence de ce prédateur a une incidence sur l’ensemble de la chaîne alimentaire.

Le parc demande aussi 100 000 euros aux chasseurs sous-marins pour « préjudice moral », et 18 000 euros pour le même préjudice à leurs clients : six écaillers et restaurateurs ayant pignon sur rue à Marseille, et qui ont profité de cette manne. Ces commerçants « ont acheté du poisson issu de la pêche non professionnelle, troué, harponné (…), mais ont bénéficié d’un régime très favorable », a souligné M. Mabile, rappelant qu’ils ont évité le procès public au pénal et n’ont été condamnés qu’à des amendes allant de 800 à 1 500 euros.

Les avocats des écaillers et restaurateurs ont demandé au président de ne pas céder à la « pression politique et médiatique » et de « ramener ce dossier à sa mesure », évoquant « juste quelques poissons achetés », ou encore « cinq douzaines d’oursins ». Le délibéré doit être rendu le 6 mars 2020.

Le Monde (08.11.2019)

 

 

 

 

 

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Z
Croisons les doigts pour que les peines soient exemplaires d'un bout à l'autre de cette bande de malfaisants!
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C
Ah! Jean-Louis, avez-vous déjà demandé à un restaurateur l'origine des produits proposés?<br /> Moi, oui : ou il fait semblant de ne pas comprendre ma question, ou je suis remballée!!!
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J
Vous avez raison Claude : de toute manière, le restaurateur peut raconter n'importe quoi à son client ! Cela dit, les établissements qu'il m'arrive de fréquenter sont généralement très fiers de m'énumérer la liste de leurs fournisseurs (bio et locaux)... Mais, il ne s'agit pas, en l’occurrence, du même type de restaurants...
K
C'est une bonne chose !!
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D
Premier dossier dans ce domaine...ça bouge quand même , et cela bougera plus encore si les sanctions sont à la hauteur du préjudice.....dans l'illégalité !!!
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D
on peut en attendre une jurisprudence pour d'autres préjudices écologiques par exemple contre les braconniers de phoques sur le littoral, ou encore de pollueurs industriels
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J
Des peines exemplaires qui pourraient être à même de dissuader les contrevenants ! A suivre… Mais, une fois encore : la demande est là ! Si les restaurateurs sont implicitement complices, les consommateurs le deviennent également en ne se posant pas ou peu de questions sur l’origine de ce qu’ils mangent ! Ceci est valable pour les produits de la mer comme pour tout le reste…
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D
acheter du produit de braconnage devrait être considéré comme recel<br /> en la matière, pour moi, toute la loin, mais rien que la loi !