2 500 scientifiques accusent : « L’agriculture intensive détruit la biodiversité »

Publié le par Jean-Louis Schmitt

C’est une première : plus de 2 500 scientifiques d’Europe et d’ailleurs adressent une lettre ouverte au Parlement européen, en demandant la réforme de la PAC. Car Ils établissent un lien direct entre intensification de l’agriculture et disparition croissante de la biodiversité.

Certains oiseaux sont exposés à des menaces supplémentaires pendant leur migration et sur leur site d'hivernage à cause de la chasse et du braconnage. DR

Oiseaux, mammifères, reptiles, amphibiens et insectes disparaissent peu à peu de la planète en quelques années à l’échelle de l’histoire de la Terre. L’heure est grave.

Pour faire cesser cette mort assurée du patrimoine naturel qu’ils corrèlent sans équivoque, directement aux pratiques agricoles non-respectueuses de l’environnement, et alors que les négociations autour de la PAC 2021–2027 se poursuivent, 2 500 scientifiques, d’Europe et d’ailleurs, viennent d’envoyer une lettre ouverte aux parlementaires de Bruxelles. C’est une première! Ils exhortent l’Europe à réformer sa politique agricole commune (PAC) « pour en faire une réponse aux enjeux du changement climatique et de la disparition de la biodiversité, plutôt qu’une complice de la destruction de la nature ».

Près de 60 milliards d’euros payés par les contribuables de l’UE financent chaque année l’agriculture intensive et industrielle subventionnée majoritairement par la PAC. Selon les signataires de la lettre ouverte, « ces activités ont conduit à une diminution de plus de 55% des populations d’oiseaux européens en milieu agricole entre 1980 et 2015. Dans les réserves naturelles d’Allemagne, les populations d’insectes ont chuté de 76% en 27 ans. Ces deux chiffres sont liés et des tendances similaires sont observées en Europe pour d’autres familles d’animaux et de plantes vivant en zones rurales. »

Les experts pointent du doigt la disparition des haies et des arbres, l’usage de pesticides, l’expansion de l’irrigation et la destruction des pâturages comme principaux responsables du déclin de la biodiversité dans les espaces cultivés, qualifiés d’ « inhabitables monocultures à rendement maximal ». Certains oiseaux sont en outre exposés à des menaces supplémentaires pendant leur migration et sur leur site d’hivernage à cause de la chasse et du braconnage.

Responsabilité historique

En soutien à la lettre envoyée, Pauline Rattez, chargée de mission agriculture à la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), précise qu’"il est scientifiquement démontré que l’agriculture intensive détruit la biodiversité".

« En réformant la PAC en profondeur afin de privilégier les pratiques agricoles responsables et ainsi redonner une place à la nature dans les zones rurales, la nouvelle Commission européenne a l’opportunité unique d’inverser la tendance avant qu’il ne soit réellement trop tard. C’est une responsabilité historique vis-à-vis des peuples et de la planète. »

La lettre a été envoyée au Comité du développement agricole et rural (AGRI) et au Comité de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) de la Commission européenne par les organismes scientifiques suivants : European Ornithologist Union; European Mammal Foundation; Societas Europaea Herpetologica; Societas Europaea Lepidopterologica; Butterfly Conservation Europe; European Bird Census Council.

Précisions que la LPO, dont le siège national est à Rochefort, est la représentante officielle en France de BirdLife international, partenariat de 122 organisations nationales de protection de la nature à travers le monde.

 

Kharinne Charov/Sud-Ouest (07.11.2019)

 

 

 

 

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D
C'est vrai Jean-Louis, quand les scientifiques parlent ça devient plus audible...par le grand nombre, pas encore par les dirigeants; alors pour encore augmenter ce nombre , je me permets de diffuser sachant que tu en es d'accord.
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Z
Ils ont tellement tiré la sonnette d'alarme qu'il n'y a plus de sonnette : on est dans le mur! Mais les lobbys gouvernent et la voix des scientifiques n'est rien à côté du bruit du tiroir caisse!
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D
Mac-Cormick, Dustbowl, Kornbelt, Openfields et autres abattoirs géants de Chicago.<br /> Qui n'en a pas entendu un jour parler ?<br /> L’Amérique était alors le "laboratoire de la modernité", le précurseur en presque tout.<br /> Santé, agriculture, pédagogie, éducation, industrie, architecture sans parler de culture tout court...<br /> Derniers entrés, la malbouffe et autres dérives religieuses.<br /> Malheureusement le meilleur (assez rare) y côtoie toujours le pire (en masse).<br /> Si copier relève plus de la bêtise que du crime il n'en va pas de même quand on s'entête à poursuivre dans des voies reconnues souvent par les USA eux-mêmes comme des erreurs fatales. (Maths modernes, linguistique à la Chomsky, psychiatrie, théories économiques)<br /> Se tromper pendant 30 ans c'est grave, s'entêter dans l'erreur est impardonnable et dans bien des domaines déjà irréparable.<br /> Nous n'avons pas attendu la lettre ouverte de 25 000 scientifiques pour comprendre que ça "merdait grave" depuis un moment.<br /> Déjà dans les années 60, lors de la mise en en place de la nième mouture du remembrement, on pouvait constater la mutation dans nos villages et notre environnement. Deux ou trois gros paysans s'y "partageaient" en général les bonnes terres, récupérant au passage jardins et vergers en périphérie immédiate, pour arracher par milliers les mirabelliers, les pommiers, les pruniers et ne plus cultiver que du maïs et autre soja, éliminant au passage férocement la concurrence (leurs frères agriculteurs).<br /> Ce sont ces gens-là qui, depuis, empoisonnent l'air, l'eau et le contenu de nos assiettes. <br /> Ce sont eux qui exterminent la faune et la flore. <br /> Or, dire tout ça revient une fois de plus à prêcher dans le désert !<br /> Car ils s'en foutent royalement, soutenus par les économistes, les agrochimistes, les agro-industriels et la grande distribution.<br /> Tout ce beau monde, grâce à une armée de lobbyistes installés à demeure dans nos institutions, farcissent les têtes de nos élus trop paresseux ou stupides pour réfléchir, en leur fournissant clés en main "rapports pseudo-scientifiques" et "argumentaires" plus pourris les uns que les autres.<br /> Trop heureux qu'on leur fasse le boulot<br /> Trop peureux pour résister et dire NON au nom du peuple qui les a élus <br /> Quant aux milliers de signatures, je vous laisse deviner ce qu’il en sera fait...
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O
Joliment résumé, et comme le dit Denis c'est sans espoir. C'est rageant de voir disparaître la beauté et la complexité simplement pour le profit et l'absence de vision à long terme. Nous allons le payer cher.
J
C'est une bonne et lucide analyse !
K
Évident... et l'heure est grave... <br /> Alors, il faut agir et avancer...
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L
qui écoute les chercheurs , hélas
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F
Eh oui, tout cela est bien connu... mais voyez comment les agriculteurs (pardon FNSEA et JA) réagissent : c'est de l'agribashing... même le ministre est à leur botte et défend la meilleure agriculture du monde... dans ces conditions on n'est pas au bout de nos peines... et la biodiversité a encore des soucis à se faire.
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F
On avance, mais il reste tellement à faire...
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C
C'est d'une telle évidence...
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J
C’est une évidence que l’agriculture intensive et productiviste contribue amplement à la destruction de la biodiversité ! Mais, comme pour la souffrance des poissons, lorsque ce sont des scientifiques qui l’affirment, l’information devient soudain plus crédible et plus sérieuse… Reste maintenant à en convaincre les responsables eux-mêmes et nos dirigeants et, ça, c’est une autre histoire !
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