Invasion de punaises diaboliques : “on ne s'en débarrassera pas”

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Venue d'Asie, Halyomorpha halys a été repérée dans toute l'Europe. En France, aucune région n'est épargnée, surtout pas l'Alsace, théâtre de ses premiers exploits en France... ni la région parisienne ou Bordeaux. Les signalements se multiplient. Et les moyens de lutte ne sont pas encore au point…

A gauche, l'envahisseuse punaise diabolique venue d'Asie ; à droite sa cousine européenne, la punaise nébuleuse. / © Punaise diabolique : Hectonicus, punaise autochtone : Didier Descouens

Bien au chaud chez vous, elles patientent. Et selon les régions et les températures, commencent à revenir... Le printemps signera leur grand réveil. S'il vous arrive d'en repérer, c'est que vous les avez dérangées dans leur léthargie. Ou qu'une source de chaleur inattendue les a ravivées. Ce qui est sûr, c'est qu'elles sont bien là. Et pour longtemps. "En fonction de la météo, on s'attend à une vraie explosion", explique Jean-Claude Streito, spécialiste de Halyomorpha halys"Il suffit d'un printemps chaud et sec comme en Italie en 2017..."

Invasion de punaises diaboliques : elles débarquent et ce n’est qu’un début 

Reconnaissables à leur carapace marbrée, les punaises diaboliques, ou asiatiques car originaires de Chine, ont pris patte en Europe par la Suisse en 2004. Elle serait probablement arrivée cachée dans du matériel pour un jardin oriental. Mais le problème c'est qu'il en arrive continuellement. "Elles voyagent très bien, cachées dans des trains, des containers, explique le chercheur à l'Inra, l'institut national de la recherche agronomique. Elles n'ont pas besoin de plantes. On en a repéré beaucoup dans les voitures qui arrivent d'Asie par bateaux."

Halyomorpha halys ou punaise diabolique adore les fruits. / © Jean-Claude Streito

Et celles qui sont déjà présentes s'épanouissent. Depuis notre précédent article, les signalements se multiplient, via l'application AGIIR. Plus de 2.000 depuis octobre 2018, contre une centaine par an en moyenne depuis le lancement de l'enquête. "Difficile de savoir s'il s'agit d'un engouement pour l'application suite à la médiatisation ou une explosion de la population, confie Jean-Claude Streito. Pour moi il y a un peu des deux. Cela nous a permis d'identifier formellement un cas de punaise diabolique à Lille. Et les foyers importants, à Strasbourg, Bordeaux et surtout Paris."

Menace sur le Nutella

Les enjeux sont avant tout économiques. Rappelons que la punaise asiatique n'est pas dangereuse pour l'homme, en règle générale. Mais elle représente une vraie menace pour certaines cultures. Aux Etats-Unis, où la bestiole est présente depuis les années 90 déjà, elle provoque de gros dégâts, et la lutte chimique traditionnelle se révèle inefficace. En Europe, c'est l'Italie qui est aux premiers rangs.

La punaise diabolique attaque volontiers pommes, poires ou pêches, et, plus surprenant, kiwis et noisettes. Et c'est peut-être de là que viendra le salut. Les pouvoirs publics restent pour l'instant sourds aux appels du pied des chercheurs, l'Europe tarde à mettre au point un programme de surveillance et d'expérimentation de lutte. Mais les intérêts privés sont eux bien sensibles à la cause.

Ainsi, un certain géant de l'agroalimentaire, Ferrero, pour ne pas le nommer, fabrique sa célèbre pâte à tartiner à base de noisettes italiennes ou turques. En Italie, la punaise a déjà causé de gros dégâts. Et on vient justement de signaler la présence des premières punaises asiatiques en Turquie. De quoi accélérer quelque peu les recherches sur le sujet...

Larves et oeufs d'Halyomorpha halys / © David R Lance, USDA APHIS PPQ

"On ne s'en débarrasera pas", reprend le chercheur, "il faut apprendre à cultiver malgré elle." Or pour l'instant, la méthode la plus efficace consisterait à tendre des filets anti-insectes au-dessus des vergers. Ce qui pose la question de la pollinisation. Quant aux autres méthodes de lutte, il faudra encore quelques années de recherche pour aboutir. Les pièges à phéromones, efficaces mais coûteux, ou l'introduction de l'ennemi naturel de la punaise asiatique, une certaine guêpe parasitoïde, qui pond ses larves dans les œufs de la bestiole, pour laquelle il faut avant tout étudier l'impact sur les autres espèces locales. Pour ne pas provoquer une autre invasion.

Quoique la lutte soit de toute façon permanente. A l'Inra, on rappelle qu'en moyenne, en France, on détecte chaque année sept nouvelles espèces invasives d'insectes ou d'acariens, depuis les années 2000. Contre une à deux par an au siècle précédent. La mondialisation est passée par là.

 

Daniel Gerner/France3 Grand Est (07/02/2019

 

 

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S
un peu " flippant " !!! Et hélas, oui merci à la mondialisation à l'extrême !!
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C
ah oui, j'avais vu l'article sur un journal. Bisous
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M
N'y aurait il pas un ou des plantes répulsives car s'il faut introduire un prédateur extérieur , on joue au apprentis sorciers !
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Z
Ici, il y a aussi des petites punaises vertes dans le jardin, je ne sais pas si elles sont écolos! Nous vivons en bonne intelligence , chacune chez soi , elles, les punaises du bouleau et moi, la punaise du logis!
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M
Peu de commentaires mais, il sont savoureux ! Après tout : vous avez raison, mieux vaut en rire ! Et le rire, c'est bien connu, c'est excellent pour la santé ! Pourquoi dès lors s'en priver ?
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O
Une bonne nouvelle. Pas de panique, elle est mignonne avec ses petits yeux bridés, encore que j'ai une petite préférence pour notre punaise alsacienne, histoire d'être un peu chauvin. En attendant vive la route de la soie, Mr Ferrero achètera ses noisettes en Chine et tout rentrera dans l'ordre très rapidement
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J
La punaise autochtone semble avoir un gilet jaune.
O
J'ai oublié de préciser qu'à l'instant l'une d'entre elles (de punaises autochtones ), assise sur mon rebord de fenêtre au premier soleil, coiffée d'un ruban à cocarde me regarde amoureusement. On ne peut que craquer.
J
S'il y a une menace sur le Nutella, on peut espérer (ou craindre ?) qu'une solution soit rapidement trouvée !
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