De plus en plus de Français désavouent les pratiques de chasse

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Selon un sondage IFOP pour la Fondation Brigitte Bardot, 84 % des sondés sont opposés à la chasse à courre et 71 % se sentent en insécurité en se baladant dans la nature.

Chasse au gibier d’eau à Vaas, dans la Sarthe, en octobre. Photo : Jean-François Monier/AFP

L’argumentaire des chasseurs a du plomb dans l’aile. Alors que la France se prévaut régulièrement de sa tradition en la matière, la Fondation Brigitte Bardot publie les résultats d’un sondage, commandé à l’IFOP et dévoilé par Le Monde jeudi 7 décembre, sur les rapports des Français à la chasse. Il montre que de plus en plus d’entre eux sont opposés à la chasse à courre, favorables à la mise en place d’un dimanche non chassé et se sentent en insécurité en se baladant en forêt en période de chasse.

D’après les résultats de cette étude, réalisée les 21 et 22 novembre auprès d’un échantillon de 1 014 personnes selon la méthode des quotas, 71 % des interrogés ne se sentent pas en sécurité lorsqu’ils se promènent dans la nature en période de chasse. Un chiffre en forte augmentation – ils étaient 54 % en 2009 et 61 % en 2016 – qui « pourrait s’expliquer par la multiplication des accidents depuis l’ouverture de la chasse » en septembre, juge Christophe Marie, le porte-parole de la Fondation Brigitte Bardot.

Il en veut pour preuve les neuf accidents mortels qui ont déjà marqué la saison, notamment l’adolescent de 13 ans tué en Vendée en septembre et la femme de 69 ans abattue dans son jardin par un chasseur qui l’avait prise pour un cerf, en octobre en Aveyron. Il y a quelques jours encore, le 3 décembre, deux chasseurs ont péri lors de battues, l’un dans le Var et l’autre dans le Tarn. L’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) a comptabilisé 143 accidents de chasse au cours de la saison 2016-2017, dont 18 mortels.

84 % des sondés contre la chasse à courre

Autre sujet qui résonne dans l’actualité : la chasse à courre, qui a créé la polémique en octobre avec l’abattage d’un cerf dans une propriété privée d’une petite commune de l’Oise ; 84 % des sondés se disent contre cette pratique. Là encore, les chiffres sont en progression, alors que 73 % des Français y étaient opposés lors d’un précédent sondage en 2005. Fait intéressant, les opposants se retrouvent autant chez les Parisiens que les habitants des autres régions, dans les communes rurales comme dans les agglomérations, ainsi que de manière égale dans toutes les tranches d’âge.

Les différences sont en revanche plus marquées entre les hommes (80 % contre) et les femmes (88 % opposées), entre les catégories socio-professionnelles supérieures (77 %) et les employés et ouvriers (85 %) et entre l’appartenance politique à gauche (90 % d’opposants) et à droite (79 %).

82 % favorables aux dimanches non chassés

Des chasseurs tiennent un renard mort lors de l’ouverture de la chasse dans la Sarthe, le 24 septembre. Photo : Jean-François Monier/AFP

Parmi les autres thématiques abordées, l’association a posé la question de la période de chasse. Selon le sondage, 79 % des sondés sont favorables à la réduction de sa durée et 82 % des Français se prononcent en faveur du dimanche comme journée non chassée, soit davantage qu’en 2016 (78 %) et qu’en 2009 (54 %). Une fois de plus, les opposants sont aussi nombreux chez les citadins que les ruraux. Ce principe d’un jour sans fusil avait été adopté par la loi Voynet sur la chasse de 2000 – qui avait opté pour le mercredi –, mais ce texte avait été abrogé trois ans plus tard par la loi Bachelot sur le même sujet.

« On a la plus grande étendue de chasse en Europe, et l’on reste le seul pays européen où cette pratique est autorisée sept jours sur sept. Or, près de 60 % des accidents de chasse ont lieu le dimanche, lorsque la nature est fréquentée par des familles en promenade, des randonneurs, des joggeurs ou des cyclistes », regrette Christophe Marie, qui dénonce un « monde à l’envers » : « Les chasseurs, qui représentent 1,5 % de la population, empêchent 98,5 % des Français de profiter des activités de plein air en toute sécurité. »

89 % pour l’interdiction de la chasse aux trophées

Le sondage s’intéresse à une série d’autres domaines : 66 % des Français sont opposés à la réglementation qui autorise toute l’année la destruction de 19 espèces classées nuisibles (renards, blaireaux, corbeaux, etc) et 89 % se prononcent pour l’interdiction de la chasse aux trophées et leur importation en France, qui représente le 5e pays importateur en Europe.

A noter que si seulement 12 % des sondés ont déjà chassé, ce critère ne semble pas être déterminant pour la majorité des réponses. Ainsi, 60 % des Français interrogés ayant déjà chassé sont tout de même favorables à l’instauration d’un dimanche sans fusil et autant sont opposés la chasse à courre.

La Fondation Brigitte Bardot n’a en revanche pas préféré interroger les sondés pour savoir s’ils sont globalement pour ou contre la chasse afin de ne pas « fermer tout débat mais plutôt pointer des pratiques que l’on peut réformer », indique Christophe Marie.

Sujet passionnel

« Ce sondage prouve que la préoccupation récente de l’opinion publique en faveur de la condition animale concerne également le domaine de la chasse, alors que c’est une tradition ancrée », juge le porte-parole. L’ONG appelle le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, à interdire la chasse à courre – comme l’ont fait l’Allemagne, la Belgique ou l’Angleterre – à instaurer un dimanche sans chasse ou encore à revoir la classification des espèces nuisibles.

« Cette montée de l’opposition à certaines pratiques de chasse n’est pas nouvelle, elle date du milieu des années 1970 », relativise Héloïse Fradkine, sociologue à l’Observatoire sociologique du changement (Sciences Po/CNRS) et auteure d’une thèse sur le monde de la chasse. En cause dans ce sujet « passionnel » : la montée en puissance des préoccupations environnementales et animalistes, la recomposition des catégories sociales venues habiter dans les zones rurales, plus enclines à un « usage contemplatif de la nature », et le fait que moins de gens ont des chasseurs parmi leurs proches. Jusqu’en 1975, plus d’un homme adulte sur dix chassait, rappelle-t-elle, contre trois sur cent aujourd’hui.

Willy Schraen, le président de la Fédération nationale des chasseurs, dénonce de son côté un « sondage orienté ». « Dans les lieux publics, comme les forêts domaniales, la chasse est extrêmement réglementée et sécurisée : elle a lieu deux jours par semaine ni le dimanche ni le mercredi et elle est indiquée par de nombreux panneaux, détaille-t-il. Mais la grande majorité du territoire, ce sont des champs et des forêts privés, dont les propriétaires peuvent jouir comme ils le souhaitent. Les promeneurs doivent donc se souvenir qu’ils sont chez autrui. »

Quant à la chasse à courre, qualifiée de « cruelle » par la Fondation Brigitte Bardot, Willy Schraen parle de « méconnaissance de cette pratique ». « C’est la chasse qui tue le moins d’animaux [3 000 par an] et qui est une des plus populaires : 300 000 à 400 000 non chasseurs suivent les équipages chaque année », assure-t-il. Au final, pour Willy Schraen, la chasse « conserve une bonne image ». L’érosion du nombre de chasseurs a cessé, avance-t-il, et la Fédération enregistre une hausse de la demande de nouveaux permis.

LE MONDE/Audrey Garric (07.12.2017)

Publié dans Chasse

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J
Un dernier point puisque le sujet, comme d'habitude, passionne... En France, contrairement à ce que certains pensent et disent : on n’a nul besoin de chasser pour se nourrir ! On le fait uniquement pour s’amuser –pardon : pour « réguler », c’est comme ça que ça s’appelle officiellement- et, ça, c’est intolérable n’en déplaisent à… ceux qui se sentent concernés ! <br /> Par ailleurs, je lis un peu plus bas que « la chasse fait partie du vivant… » : L’image est certes bucolique à souhait mais, ce que je vois moi, ce sont des cadavres, beaucoup de cadavres… soit, en fait, tout le contraire du vivant...
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D
Il est bon que les mentalités évoluent mais le lobby est encore puissant ; il faudrait arriver à ce que la priorité ne soit plus la chasse, mais la gestion bien comprise, avec la chasse comme outil éventuel, et certains animaux devraient disparaître de la liste des gibiers et bien sûr des nuisibles. Par exemple, pourquoi tirer les alouettes ? Quant au dimanche sans chasse, dans les forêts domaniales, c'est une bonne idée
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C
merci pour ce texte ; je me souviens d'un dimanche où mon mari et moi nous promenions en forêt ( à cette époque je marchais encore^^) des tirs nous ont fait interrompre notre promenade ; et là nous avons pu contempler les "sportifs en plein effort;" assis sur les sièges dépliants et en train d'attendre que les pauvres animaux sortent des bois ; c'était indécent , éoeurant ; j'ai vraiment du mal à comprendre qu'une si petite minorité impose ses volontés au reste de la population .
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S
Un peu plus de sécurité ne peut pas faire de mal, mais la chasse a aussi son rôle, social, écologique, économique. Pour répondre à ton commentaire, il me semble que ce qui afflige l'humanité est de se monter le choux et d'occulter la complexité de la réalité. Ça donne les extrémismes, les fascismes, etc.
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S
Tu dis : "lutter pour la protection de notre environnement n’est pas se monter le choux" je suis d'accord et je n'ai jamais dit cela. C'est le fait d'utiliser la protection de l'environnement à des fins d'"excitation émotionnelle" qui me semble dangereux. De plus il ne faut pas amalgamer chasse et protection de l'environnement : l'un peut être compatible voire nécessaire à l'autre, ou le contraire, selon les cas. De plus ce n'est pas parce que tu prends un fait (poser des pièges) que cela prouve qu'il s'inscrit à l'encontre de la protection écologique (ou pas). Affirmer n'est pas prouver. Enfin le discours critique est absolument nécessaire, mais je crois qu'il ne l'est plus lorsqu'il monte les gens les uns contre les autres car là le discours est remplacé face à l’action violente. Enfin il y a des inerties sociales, des coutumes qui peuvent choquer et je pense qu’il faut que ceux qui les réprouvent le fasse savoir : c’est comme ça, aussi, que les sociétés avancent. Mais dresser les gens les uns contre les autres me semble contraire au but, surtout qu’en la matière nul n’est détenteur de la Vérité ce qui justifierait de l’imposer à l’autre, un autre qu’il faut impérativement respecter, c’est la base de la paix sociale. Je trouve dangereux qu’on soit dans une société qui semble oublier cela et qui s’extrêmise.
J
Lorsque l’on élève du gibier pour le relâcher à l’ouverture de la chasse et le tirer alors que ce même gibier n’a pas été élevé en pleine nature, c’est une affirmation qui n’a pas à être prouvée, c’est un fait établi. Lorsque l’on dispose des pièges pour éliminer les prédateurs du gibier, on ne fait pas vraiment de le protection écologique et cela est aussi un fait établi.<br /> Je ne vois pas pourquoi il n’y aurait pas de discours critique à l’égard des chasseurs qui de nos jours exercent une forme d’extrémisme destructeur et déstabilisateur vis à vis de la nature que l’on voit de plus en plus mise en péril et là je suis d’accord : pas que du fait de la chasse.<br /> Tenter de lutter pour la protection de notre environnement n’est pas « se monter le choux » et il y a aussi des luttes contre les pollueurs, les empoisonneurs, les bétonneurs...c’est ça faire face aux faits!
S
Ne pas se monter le chou c'est faire face aux faits sans s'en prendre à son prochain, ni dresser les gens les uns contre les autres, car cela, petit à petit, mène à la violence, ce qu'il semble que vous réprouviez. La façon d'équivaloir l'animal et l'humain est une idée dangereuse car elle peut justifier les pires massacres (déprécier l'autre en a toujours été le premier pas ). De plus la chasse fait partie du vivant, en dehors même des traditions, (ce qui ceci dit n'est pas une raison pour la continuer). Il ne s'agit pas d'accepter de barbarie, ni d'accepter votre assertion que la chasse en est une. A ce compte-là on peut aussi dire que couper des végétaux est une barbarie... Le jour où l'on pourra se nourrir avec des imprimantes 3D, alors peut-être effectivement pourra-t-on s'extraire progressivement de pratiques devenues inutiles...
C
A Stef : juste une question c'est qui les "extrémistes" ? Ceux qui massacrent des millions d'animaux pour leur plaisir (en étant fier de le faire en plus !) ou ceux qui veulent respecter le vivant ? La chasse de loisir n'a aucune place dans une société civilisée. La même violence que nous exerçons envers les animaux, on l'exerce aussi envers les humains... "On n'a pas deux cœurs, l'un pour les animaux l'autre pour les humains, on a un cœur ou on n'en a pas" (Lamartine). Je dis ça aussi pour tous ces animaux maltraités et massacrés et que les gens mangent à s'en rendre malade. Il faudrait ne pas "se monter le chou" ? donc accepter les barbaries et regarder sans rien dire et faire ? C'est ça votre suggestion ?
S
... quand elle se fait au dépens de l'autre.
S
Il me semble que les animaux sont d'abord mis en danger par le changement climatique, les pollutions... et vos affirmations ne sont pas prouvées. Ou alors que fait l'état ? Se monter le chou est aussi une forme de perversité, parce qu'elle se fait au dépens de l'autre.
J
écologique la chasse ? Si elle l’était vraiment il y aurait moins d’espèces en péril. Certes les chasseurs préservent des animaux mais c’est pour mieux les abattre ensuite et ça c’est une forme d’extrémisme pervers.
M
Tout est dit en une photo : ce chasseur balançant un renard mort au bout de son bras, cadavre qu'il va probablement jeter négligemment dans un fourré... un animal mort pour rien ! Quelle tristesse...
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M
Bon article du Monde ! Merci pour le partage. <br /> J'en profite pour vous dire que j'aime beaucoup votre blog et son ton souvent sans concession pour ceux qui s'en prennent aux animaux ! <br /> Je suis de tout cœur avec vous.
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C
Willy Schraen, président des chasseurs, minimise la portée de ces chiffres pourtant éloquents ! C'est logique : en tant que responsable de cette fédération, il se doit de défendre ses ouailles ! Pour autant, les faits sont là : la chasse est de moins en moins populaire et les chasseurs de moins en moins nombreux ce à quoi j'applaudis bien sûr ! <br /> Le million qui reste -et autant voire beaucoup plus d'armes- constitue une véritable plaie pour la biodiversité et la société dans son ensemble...
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D
Le fait que le sondage ait été commandé par la Fondation Bardot va certainement alimenter quelques commentaires acerbes de la part des chasseurs : leur inimitié pour BB est légendaire ! C'est normal : elle ne les a jamais ménagé non plus à chaque fois qu'elle a évoqué la chasse ! On peut en effet lui reprocher certaines choses à BB mais certainement pas son franc-parler lorsqu'elle évoque le sort des bêtes, de toutes les bêtes...
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J
Sans autre effet que de remettre le sujet sur le tapis, ce sondage –très logiquement décrié par les chasseurs et leur fédération puisqu’il ne leur est en rien favorable- révèle tout de même quelques chiffres intéressants dont celui de ces ‘’ 300 000 à 400 000 non chasseurs suivant les équipages [de chasse à courre] chaque année’’ ! <br /> Voilà qui, personnellement, m’interpelle ! En effet, je n’ai jamais compris cet attrait pour le morbide de la part de mes pairs. De la même manière, j’ai du mal à comprendre comment les rabatteurs (toujours nombreux et volontaires…) des battues qui ont actuellement lieu tous les WE chez nous, peuvent se prêter à ce ‘’jeu’’ cruel consistant à pousser les animaux vers les lignes de tirs et donc vers une mort certaine… <br /> Sans doute qu’il n’y a aucun rapport entre le passé peu glorieux de notre pays sous l’occupation nazi, pour autant je ne peux m’empêcher de faire un parallèle entre les dénonciations de cette époque trouble et ces trahisons ‘’ordinaires’’ perpétrées sur des bêtes sans défense… <br /> Le genre humain –et celui-là tout particulièrement- restera toujours une insondable énigme pour moi !
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