Les pollinisateurs sauvages, méconnus mais également en danger

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Les pollinisateurs sauvages pourtant bien plus nombreux, restent moins médiatisés que les abeilles domestiques. Alors qu'ils sont tout autant menacés et que leur importance n'est plus à prouver.

Les pollinisateurs sauvages, moins célèbres que les abeilles domestiques souffrent également de l'activité humaine. ©ALLILI MOURAD/SIPA

Les pollinisateurs sauvages, moins célèbres que les abeilles domestiques souffrent également de l'activité humaine. ©ALLILI MOURAD/SIPA

Les abeilles domestiques qui produisent notre miel sont loin d'être les seuls pollinisateurs qui butinent nos campagnes. Rien qu'en France vivent près de 1000 espèces d'abeilles sauvages, dont une cinquantaine de bourdons, 500 mouches Syrphes... La planète elle, compte pas moins de 20 000 espèces d'abeilles. Un sérieux coup de pouce à la pollinisation. Mais à l'image des abeilles domestiques, ces nombreux insectes souffrent de l'activité humaine. Comme l'explique le ministère de l'environnement dans un communiqué sur Le plan national d'action "France terre de pollinisateur": "Les causes du dépérissement des insectes pollinisateurs sauvages sont multiples, et insuffisamment expliquées aujourd'hui. Mais, l'homme, en dégradant leurs habitats et en détruisant les espèces de plantes à fleurs qui constituent leurs ressources alimentaires, pourrait en être largement responsable." En tout, 40% des espèces de pollinisateurs invertébrés (en particulier les papillons et les abeilles) seraient en voie d'extinction.

 

Les abeilles sauvages: Une quantité non négligeable

 

Serge Gadoum, entomologiste ingénieur écologue, et Chargé de projet pollinisateurs sauvages à l'office pour les insectes et leur environnements (OPIE) précise que "les espèces d'abeilles domestiquées sont beaucoup moins nombreuses que celles des pollinisateurs sauvages." Malgré ce constat, la part belle est faite aux premières, largement utilisées pour l'élevage. Comme l'abeille à miel occidentale (Apis mellifera) et l'abeille à miel orientale (Apis cerana). La première remporte d'ailleurs la première place en terme de production avec pas moins de 81 millions de ruches pour 1,6 millions de tonnes de miel produites par an, selon un rapport d'évaluation sur les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire. Cette très appréciée substance sucrée peut expliquer la popularité de certains pollinisateurs par rapport aux autres, car comme l'explique Serge Gadoum: "Les pollinisateurs sauvages ne produisent pas de miel, ou alors d'un intérêt gustatif moindre et que les humains peuvent difficilement récolter. Ils ne représentent donc pas un enjeu économique direct". Ils mélangent généralement le nectar avec le pollen et le conserve pour nourrir leurs progénitures.

 

Même si aucun "enjeu économique direct" ne pointe à l'horizon, rien qu'en France, plus de 80 % des plantes à fleurs dépendent d’insectes pollinisateurs et les abeilles domestiques n’assurent qu’environ 15 % de la pollinisation. Hors, « la pollinisation animale joue un rôle vital en tant que service écosystémique de régulation dans la nature. À l’échelle mondiale, près de 90 % des plantes sauvages à fleurs dépendent, au moins en partie, du transfert de pollen par les animaux », explique le rapport d’évaluation sur les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire. Ce qui garantirait la qualité des rendements de pas moins de 75% des cultures agricoles. Le service rendu par ce processus naturel rapporte quant à lui pas moins de 265 milliards de dollars chaque année dans le monde. Soit un intérêt économique bien réel.

 

Reconstruire des habitats et réduire la concurrence

 

Une fois les constats établis, des solutions existent pour préserver ces espèces. Le plan national d'action "France terre de pollinisateur" décline plusieurs démarches et Serge Gadoum en cite quelques-unes: "Ceux qui disposent d'un jardin peuvent par exemple installer des nichoirs, laisser des surfaces de terre nue, mais aussi privilégier des plantes locales indigènes riches en pollen et en nectar. Pour les collectivités il s'agit de ne plus utiliser de produits phytosanitaires (comme les néonicotinoïdes interdits à compter de 2018), garantir des ressources florales tout au long de l'année pour les insectes qui ont des besoins répartis sur plusieurs mois, comme le bourdon..."

Une autre problématique consiste à considérer la possible concurrence induite par les colonies d'abeilles domestiques. "C'est une question très débattue entre spécialistes des pollinisateurs sauvages et certains apiculteurs. De mon point de vue, qu’il puisse y avoir concurrence, surtout quand les écosystèmes et les agrosystèmes sont simplifiés et que l’abondance et la diversité florale ne sont plus assurées. Et d’autant plus. D'autant plus lorsque s'ajoute des colonies d'abeilles introduites dans des habitats occupés par des populations déjà fragilisées". En janvier 2017, une étude de l'Université Libre de Bruxelles montrait comment des espèces massivement introduites, comme l'Apis Mellifera intégraient les communautés locales et affectaient le fonctionnement des écosystèmes.

Sciences et Avenir (18 mars 2017)

Un apiculteur relève un "cadre de corps" d'une de ses ruches. © Gilles Varela/ 20 MINUTES/SIPA

Un apiculteur relève un "cadre de corps" d'une de ses ruches. © Gilles Varela/ 20 MINUTES/SIPA

Publié dans Environnement

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