« La France n’a toujours pas tiré les leçons de la catastrophe »

Publié le par Jean-Louis Schmitt

Tchernobyl - Entretien avec Jean-Marie Brom

Physicien nucléaire farouchement opposé à l’exploitation de l’énergie atomique, Jean-Marie Brom rappelle que l’accident est toujours possible, quelles que soient les mesures de sûreté.

 Jean-Marie Brom, militant anti-Fessenheim de la première heure, était dimanche sur le pont de l’Europe pour commémorer la catastrophe de Tchernobyl. Photo : DNA – M. Rollmann

Jean-Marie Brom, militant anti-Fessenheim de la première heure, était dimanche sur le pont de l’Europe pour commémorer la catastrophe de Tchernobyl. Photo : DNA – M. Rollmann

Le 26 avril 1986, Jean-Marie Brom travaillait à l’université de Stanford en Californie. « Dès qu’on a appris qu’un accident s’était produit à Tchernobyl, on a filé avec quelques collègues à Berkeley (l’université située sur la baie de San Francisco) pour poser des grands filtres en extérieur. Quatre jours après, en récupérant les poussières, on a mesuré le nuage… »

Par rapport à l’Ukraine, la Californie, c’est pratiquement à l’autre côté du globe ; mais en Alsace, à seulement quelque 1 600 km de la centrale ukrainienne et sous les vents du panache empoisonné, officiellement, aucune trace de radioactivité… Au centre de recherches nucléaires de Strasbourg-Cronenbourg, des chercheurs avaient pourtant mesuré des niveaux de rayonnement ionisants aussi anormaux qu’inquiétants sur un prélèvement effectué au sol de l’abri à vélos. « On leur a fait comprendre à l’époque qu’ils ne devaient pas parler de leurs mesures. C’était des fonctionnaires de la République, ils n’avaient pas le choix », commente Jean-Marie Brom.

Premier responsable : le nucléaire

« Malheureusement, la France n’a toujours pas tiré les leçons de la catastrophe de Tchernobyl, regrette le militant de Stop transport – Halte au nucléaire. Elle continue de dire que c’était la faute aux Soviétiques, que la centrale était mal construite, que l’accident a été mal géré. À Fukushima non plus, le nucléaire n’est pas en cause, ce sont les murs qui n’étaient pas assez hauts pour résister au tsunami ». Et de rappeler qu’à Fessenheim, un tremblement de terre, une rupture de la digue du Rhin, un crash d’avion, un fou – pour ne parler que d’éléments extérieurs – auraient les mêmes conséquences qu’en Ukraine et au Japon.

« On a dit et répété que l’accident de Tchernobyl s’est produit parce qu’il n’y avait pas d’enceinte de confinement. Mais l’explosion a soulevé 1 300 t de béton. Avec une telle pression, l’enceinte de Fessenheim serait ouverte comme une coquille de noix ».

C’est dit avec d’autant plus de force que Jean-Marie Brom nourrit toujours de gros doutes quand à la promesse de François Hollande de fermer Fessenheim. « Avec la loi de transition énergétique, il a quand même réussi à transformer le plafond en plancher. Tant que l’EPR de Flamanville ne fonctionne pas, on ne fermera pas Fessenheim ». Et s’il voulait rendre la procédure de fermeture irréversible avant la fin de son mandat, « pourquoi est-ce que ce n’est pas déjà fait ? »

Hier matin, François Hollande a confirmé que Fessenheim serait la première centrale nucléaire à fermer en France dans les années qui viennent. Le décret qui abrogera l’autorisation d’exploiter de cette centrale sera pris « cette année », a-t-il ajouté.

DNA-S.W. 26/04/2016

Publié dans Nucléaire

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