Greenpeace lève le voile sur le Tafta
L’ONG a mis en ligne hier 248 documents confidentiels mettant à jour les discussions complexes et opaques autour du traité transatlantique. Elle craint la fin du « principe de précaution ».
Pour ses détracteurs, le traité conduirait à un abaissement des standards européens environnementaux et agroalimentaires. Photo Julio PELAEZ
Greenpeace a levé une partie du voile sur le Tafta, en mettant en ligne 248 pages de documents confidentiels (*) provisoires rédigés avant le dernier round de la négociation sur le traité de libre-échange entre les États-Unis et l’Europe, qui s’est tenu fin avril à New York.
Pourquoi une telle fuite ?
L’ONG dénonce l’absence de transparence des discussions autour de ce traité, dont le but est de favoriser les échanges commerciaux entre les deux côtés de l’Atlantique. « Le secret autour des négociations qui ont commencé-ils y a deux ans et demi est contraire aux principes démocratiques de l’Europe et des États-Unis », explique Greenpeace. Si la Commission européenne, à la manœuvre côté européen, a fini par publier sous la pression son mandat de négociations, les États-Unis ne l’ont, en revanche, jamais fait. Jusqu’au début de l’année, les parlementaires devaient aller à l’ambassade américaine pour consulter les documents. Ils ne peuvent consulter les documents que dans une « salle de lecture » hautement surveillée.
Fin du principe de précaution ?
Le principe de précaution, qui permet à l’Europe de refuser certains produits en raison de risques pour la santé et/ou l’environnement, « n’est pas mentionné » dans les chapitres dont Greenpeace a eu connaissance. L’ONG pointe une menace sur sa disparition, ce que dément Cecilia Malmström, commissaire européenne au commerce. « Aucun accord commercial de l’Union européenne ne viendra jamais abaisser le niveau de protection des consommateurs, pas plus que de la sécurité alimentaire ou de l’environnement. Les accords commerciaux n’affecteront pas notre législation sur les OGM, ou notre mode de protection de viande bovine en toute sécurité, ou nos moyens de protection de l’environnement », se défend-elle.
Un traité pour quand ?
Un accord n’est pas pour demain. Ce que révèlent les documents publiés par Greenpeace est que… les discussions n’avancent pas beaucoup. Les positions entre les différentes parties sont encore très divergentes. Début mars, devant les sénateurs, Mathias Fekl, secrétaire d’État au Commerce extérieur, jugeait les retours « guère encourageants », et pointait les blocages sur plusieurs points chers à la France comme les indications géographiques protégées ou l’agriculture. Un autre sujet suscite l’inquiétude de la France : le recours à l’arbitrage, souhaité par les États-Unis, pour trancher d’éventuels différents entre les États et des multinationales qui s’estimeraient lésées par une législation nationale.
Elodie Bécu 03/05/2016